Henri Vernes : Bob Morane 8 – Le Sultant de Jarawak


Le huitième Bob Morane débute dans une soirée mondaine qui se déroule dans un genre de club pour gentilshommes comme on en retrouve tant en Angleterre, bien que nous soyons à Paris. À cette soirée, un médecin raconte l’histoire d’une patiente aux prises avec une maladie tropicale que nul ne peut guérir. Cette femme possède une perle rose que son mari, un entomologiste mort depuis peu de la même maladie qu’elle, a rapportée de la petite île de Jarawak sise en Indonésie, un vaste archipel comme chacun sait. Or, le Sultan de Jarawak orne son turban d’une perle rose, identique à celle que possède madame de Neuville. Le médecin ajoute que seule la réunion des deux perles pourrait lui redonner goût à la vie et, par le fait même, la volonté de guérir. Cette histoire, aussi touchante qu’invraisemblable, flatte le côté redresseur de tort de Bob Morane qui, après s’être entretenu avec la dame, décide de partir à Jarawak pour convaincre Timour Bulloc, le sultan cruel et sanguinaire, comme il se doit, de lui redonner la perle jumelle pour sauver la vie de madame Neuville.

Dès le deuxième chapitre, Bob Morane se trouve sur l’île de Timour, voisine de Jarawak,  parce que le sultan, jaloux de son autonomie, refuse toute liaison aérienne ou navale avec son pays de rattachement. Il vit donc en autarcie, exploitant son peuple dont l’activité principale consiste à l’approvisionner en perles. En plus, le quart de ce bon peuple meurt chaque année d’une fièvre endémique sur cette île. La nuit même de son arrivée à Timour, Morane affronte un mercenaire malais qui, en cherchant à le molester, lui déconseille vivement de se rendre à Jarawak. Dans le même hôtel, il rencontre un Anglais du nom de George Leslie qui, lui aussi, veut se rendre sur l’île pour y effectuer des recherches sur cette fièvre afin de trouver un vaccin ou un médicament. Les deux hommes deviennent amis et, bien entendu, ne renoncent pas à leur voyage. D’ailleurs, grâce à un Hongrois, trafiquant d’ailerons de requin, ils réussissent à s’embarquer sur un rafiot et débarquent à Jarawak, accueilli par Sir Harvey Jameson, un vieux scientifique anglais et ami de Leslie.

Le jour même de son arrivée sur l’île, Bob Morane obtient une audience auprès du sultan. Comme on s’y attendait, celui-ci refuse de céder la seconde perle rose, même si la vie d’une femme est en danger. Morane remarque la fascination morbide qu’éprouve le sultan pour ses perles. Devant ce refus, il se retire… mais revient la nuit pour tenter de voler cette perle. Il se fait rapidement arrêter par la garde du sultan qui met notre héros aux travaux forcés, en l’occurrence à la récolte des perles, un travail éreintant qui n’est pas sans risque compte tenu qu’il faut plonger en apnée pendant de longues minutes pour récolter des perles. Lors d’une de ces plongées, Bob Morane sauve la vie de Khalang, un Malais qui deviendra un allié. Tous deux réussissent d’ailleurs à s’échapper grâce à un passage souterrain. S’ensuivra une fuite éperdue en mer et dans la jungle de l’île, fuite au cours de laquelle on découvre que ce ne sont pas les perles qui enrichissent la sultan, mais plutôt la culture du pavot qui fait la joie des trafiquants d’opium de cette région du monde. 

Par la suite, tout se bouscule. Le chef du village dans lequel Morane s’est réfugié se joint à lui et triomphe du Sultan qui abdique. Vaincu, miné par la fièvre, il se fait soigner par son sorcier, ce qui permet à George Leslie de comprendre que la mixture curative n’est en fait qu’une sorte d’antibiotique. L’île étant sauvée de la tyrannie de son sultan, Bob part rapidement pour la France, dans l’espoir de sauver madame Neuville. Dans ses bagages, il ramène la mixture qui permettra sans aucun doute à la sauver. Sur l’île de Timour, il déjoue un traquenard mis en œuvre par le Hongrois et son acolyte malais et finit par s’envoler pour Djakarta, puis Paris. Le roman se termine par là où il a commencé : chez madame Neuville en compagnie du médecin. Grâce à cet antibiotique, la dame est guérie et notre héros, heureux d’avoir accompli sa mission.

Le Sultan de Jarawak est le deuxième roman d’Henri Vernes à être publié en 1955. Tout comme le roman précédent (Les Faiseurs de désert), son intrigue est plutôt simpliste et, à vrai dire, assez prévisible, mais l’aventure en pays tropical suffisait encore, j’imagine, à susciter l’attention des lecteurs adolescents d’Europe et d’Amérique au milieu des années 1950. À l’instar de L’Héritage du flibustier, Bob Morane est directement impliqué dans un quasi coup d’État, signe évident d’une culture occidentale qui ne souffrait d’aucun complexe de supériorité à cette époque colonialiste. Et, bien entendu, aucune présence féminine dans ce roman. On est toujours dans un monde de gars, même si bien des femmes m’ont avoué depuis avoir lu pas mal de Bob Morane… tout comme je lisais moi-même des Sylvie !

Henri Vernes. Le Sultan de Jarawak (Bob Morane 8)c1955

Commentaires